Dossier

Qu’est-ce que l’hydrogène décarboné exactement ?

Un nouveau vecteur énergétique, oui… mais pas n’importe lequel et pas n’importe comment ! Décryptage du concept d’hydrogène bas carbone et renouvelable.


« Un pari à 7 milliards d’euros pour construire une filière de l’hydrogène en France », « Hydrogène, un plan gonflé pour la France »… Les titres des articles parus à l’automne dernier pour évoquer les ambitions françaises ont, pour la plupart tendance, à faire l’impasse sur un élément d’information : le plan hydrogène ne vise que l’hydrogène décarboné. Un détail qui n’en est pas vraiment un, car plus de 95 % de l’hydrogène utilisé à ce jour sur terre est extrait d’hydrocarbures fossiles : coupes pétrolières, charbon ou gaz naturel. En France, c’est ce dernier qui tient la barre : près de la moitié des 780 000 tonnes fabriquées chaque année dans notre pays est issue du gaz naturel. Or, pour chaque kilo produit via cette méthode, 11 kg de CO2 sont émis. Chaque année, presque 9 millions de tonnes de CO2 sont émises en France pour la production d’hydrogène carboné. Une facture qui limite l’intérêt d’étendre son usage à la mobilité. Un véhicule propulsé par cet hydrogène « gris » émettrait seulement 11 % de GES de moins qu’un véhicule au diesel classique : pas de quoi légitimer le surcoût.

L’électrolyse : vers un hydrogène plus vert

Mais si l’hydrogène est de plus en plus présenté comme une énergie du futur, c’est qu’une autre voie est possible. En l’occurrence, celle de l’électrolyse, un procédé connu depuis des décennies qui consiste à dissocier l’hydrogène de l’oxygène constituant la molécule d’eau à l’aide d’un courant électrique. Parce que l’hydrogène issu de l’électrolyse est fabriqué sans matière fossile, il n’est pas émissif. Pour autant, cela ne signifie pas qu’il est « vert ». En effet, l’analyse des émissions doit se faire sur l’ensemble du cycle de vie, en s’intéressant en particulier à la nature de l’électricité utilisée. Et sur ce point, une étude d’Analyse du Cycle de Vie publiée par l’ADEME en décembre 2020 révèle des écarts considérables. L’hydrogène fabriqué avec de l’électricité d’origine renouvelable n’émet que 1,6 kg de CO2 pour 1 kg produit, mais 2,8 kg si on utilise l’électricité du mix électrique français (on parlera alors d’hydrogène bas carbone) et presque 20 kg si l’on a recours au mix électrique moyen européen. Pour que la filière hydrogène française soit à la hauteur des espoirs placés en elle, il faudra qu’elle puisse s’appuyer sur un réseau d’électrolyseurs implantés sur les territoires et que ces derniers soient alimentés en électricité renouvelable ou a minima bas carbone. Si cet hydrogène est renouvelable ou bas carbone, alors les réductions de gaz à effet de serre seront au rendez-vous. Soit entre 75 % et 69 % de réduction par rapport au véhicule équivalent diesel, sur l’ensemble du cycle de vie, comprenant la fabrication du véhicule, la production d’hydrogène ou de carburant ainsi que la fin de vie des équipements.