Dans la ZAC de Saulaie (Rhône), un vaste réseau souterrain exploitera bientôt la chaleur fatale des eaux usées afin de chauffer et de refroidir logements et bureaux. Cette solution décarbonée bénéficiera à plusieurs milliers d’usagers et permettra d’éviter 32 000 tonnes de CO2 sur 20 ans.
Réguler la température des bâtiments grâce à la chaleur des eaux usées : voici le projet innovant en cours de construction dans la zone d’activité commerciale de Saulaie à Oullins (Rhône). Appelée cloacothermie, cette technique repose sur un principe simple : un échange de chaleur entre le réseau d’assainissement, des échangeurs et un fluide frigorifique, permettant de chauffer ou de refroidir les bâtiments. « Les eaux usées sont en moyenne entre 11 et 12 °C l’hiver et entre 22 et 23 °C l’été, explique Hakim Hamadou, ingénieur efficacité énergétique des bâtiments pour l’ADEME. De plus, le débit de plusieurs milliers de m3 par heure fait de ce flux un réservoir énergétique très important. » Très concrètement, les eaux usées sont dérivées du réseau d’assainissement public, en amont de la centrale d’épuration. Ils sont redirigés vers une centrale de production souterraine, qui transfère l’énergie calorifique à un réseau d’eau tempérée long de 2,4 km, destiné à distribuer la chaleur à l’ensemble les bâtiments. Cette dernière alimentant les différents bâtiments de la zone, à savoir des constructions résidentielles et d’activités tertiaires, ce réseau devrait permettre d’alimenter 2 000 habitants et 3 500 salariés.

Utiliser l’énergie solaire
Ce système de récupération de chaleur est inédit par sa taille : « cela avait déjà été fait dans le Rhône, mais à une relativement petite échelle : la surface totale alimentée était de 9 000 m2, observe Hakim Hamadou. Le programme d’Oullins alimentera 128 000 m2 de surface de plancher, qui étaient par le passé une friche industrielle. » Pour chauffer les habitations en hiver, le système de cloacothermie est associé à des pompes à chaleur. Ces dernières seront également utilisées pour l’eau chaude sanitaire.
Concernant les bâtiments tertiaires, des thermofrigopompes, capables de produire simultanément du chaud et du froid, seront installées. « Chaque année, 11 GWh d’énergie seront produits, dont 8,5 GWh de chaleur et 2,5 GWh de froid, reprend l’ingénieur. À partir de 2033, 80 % de cette énergie sera issue de la chaleur fatale du réseau d’assainissement. » De plus, l’ensemble de l’installation électrique, c’est-à-dire les pompes à chaleur, les thermofrigopompes, mais aussi la centrale de production souterraine, seront alimentées par des panneaux solaires, rendant la production 100 % décarbonée.
32 000 tonnes de CO2 évitées sur 20 ans
Ce projet, chiffré à 16 millions d’euros, a été financé par l’ADEME à hauteur de 48 %. « Les travaux sont conséquents, car il y a de lourdes installations souterraines, explique Hakim Hamadou. Cette zone présente cependant l’avantage d’être proche d’un réseau d’assainissement dont le flux est stable et conséquent. » Sur 20 ans, le système de récupération de chaleur de la ZAC de Saulaie permettrait d’éviter l’émission de 32 000 tonnes de CO2. De plus, le refroidissement étant partiellement assuré par cloacothermie, l’impact sur la température de l’air extérieur sera limité, réduisant ainsi le phénomène d’îlot de chaleur. Lancée en juin 2025, la construction du réseau de récupération de chaleur devrait s’achever à l’automne 2026. Les premiers bâtiments seront livrés début 2027.