Si, en France, l’objectif de neutralité carbone est acquis, la trajectoire pour y arriver reste incertaine. L’ADEME a donc décidé d’alimenter le débat avec quatre scénarios très contrastés et leurs implications : une façon d’éviter les fausses routes et d’accélérer la définition de ce chemin.
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Publiée fin 2021, l’étude prospective Transition(s) 2050 a mobilisé l’ADEME pendant deux ans. Il en est ressorti quatre trajectoires qui permettent d’arriver à la neutralité carbone en 2050, mais reposant sur des choix de société très différents. « Notre travail montre que plusieurs trajectoires sont encore possibles, c’est rassurant. Mais il souligne aussi la nécessité d’en définir une rapidement », prévient Valérie Quiniou, directrice exécutive Prospective et recherche à l’ADEME.
Quatre paris sur l’avenir
À ce stade, l’ADEME n’a pas voulu choisir une trajectoire, mais présenter les quatre scénarios sous forme de récits concrets, pour que chacun puisse s’y projeter, en cerner les atouts et les limites, ainsi que leurs impacts environnementaux, sociaux et économiques. Transition(s) 2050 soulève en effet des questions essentielles : jusqu’où sommes-nous capables d’aller en termes de sobriété ? Peut-on éviter de recourir aux puits de carbone technologiques ? Quel nouveau modèle pour l’industrie française ? Quelle alimentation pour demain ?
Le premier scénario, « Génération frugale », pousse à son maximum le curseur de la sobriété, pour atteindre l’objectif sans risque de tension d’approvisionnement énergétique et en misant sur les seuls puits biologiques pour atteindre la neutralité carbone. Mais il requiert de tels changements de comportements qu’il risque de se heurter à un problème d’acceptabilité. Le scénario 4, « Pari réparateur », est moins clivant car il suit les tendances actuelles. En revanche, il mise sur le développement à grande échelle de technologies encore incertaines pour capter dans l’atmosphère le CO2 émis en excès. Le scénario 2, « Coopérations territoriales », propose une sobriété acceptable mais s’appuie beaucoup sur la concertation et l’économie du partage, ce qui peut prendre du temps voire ne pas aboutir. Le scénario 3, « Technologies vertes », mise beaucoup sur le numérique, les énergies renouvelables et la construction neuve, ce qui demande une grande vigilance vis-à-vis des ressources utilisées (énergie, eau, métaux…), notamment de la biomasse, sur laquelle tous les secteurs souhaitent s’appuyer pour leur transition écologique.
Mesures incontournables
On l’aura compris : dans tous les cas, la neutralité carbone repose sur des paris. Se contenter d’attendre que les gens changent de comportement ou qu’une innovation voie le jour, c’est prendre la responsabilité de retarder l’action climatique et de voir s’accumuler les gaz à effet de serre dans l’atmosphère. C’est pourquoi certaines mesures restent incontournables : décarbonation, maîtrise de l’énergie, développement des énergies renouvelables, etc. D’autres exercices prospectifs récemment publiés (par RTE, négaWatt, The Shift Project…) rejoignent ceux de l’ADEME sur ces constantes.
« Chacun de nos scénarios fonctionne comme un tout, conçu de façon cohérente, en prenant en compte les besoins en ressources et les contraintes des systèmes qui les produisent. On peut les ajuster, mais pas à la carte », insiste David Marchal, directeur adjoint Programmes et expertises à l’ADEME. Prochaine étape : réfléchir à des outils de politique publique efficaces et pertinents pour embarquer toute la société vers la neutralité carbone.