Apparue à la fin des années 2000, la problématique de la rénovation des bâtiments est une question aussi bien technique que sociologique et financière. Progressivement s’impose la notion d’ingénierie de la rénovation pour atteindre une performance globale.
Partager
Si la rénovation du parc de bâtiments est aujourd’hui reconnue comme une action incontournable dans l’atteinte des objectifs de neutralité carbone fixés par l’État à l’horizon 2050, cette politique publique est encore récente.
Les années 2008-2013 : la recherche en rénovation globale s’impose
La problématique de la rénovation des bâtiments s’impose à la fin des années 2000, avec la Directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments en 2006, puis la loi Grenelle 1 en 2009. Celle-ci fixe comme objectifs la construction de bâtiments basse consommation (BBC) à l’horizon 2012 puis de bâtiment à énergie positive à partir de 2020. En 2012, le projet RENAISSANCE[1], issu du programme européen CONCERTO, montre qu’il est possible de parvenir à rénover des bâtiments à très basse consommation d’énergie sans rupture technologique, les techniques déjà à l’œuvre pouvant suffire. Toutefois, réaliser 700 000 rénovations BBC par an (objectif de la Stratégie nationale bas carbone) est un enjeu majeur, tout comme assurer la formation de professionnels qualifiés pour répondre à la demande. Des programmes d’incitation à la rénovation sont lancés, tel celui des « 500 maisons rénovées basse consommation » porté en 2008 par Électricité de Strasbourg et la Région Alsace. Le Plan français de rénovation énergétique de l’habitat (PREH) vise en 2013 à mettre en place les conditions nécessaires à la massification de la rénovation (structuration économique de la filière, accompagnement technique, financier et administratif des ménages). Dans la continuité des actions lancées par le Grenelle de l’environnement, la loi de transition énergétique pour la croissance verte est adoptée en août 2015, marquant véritablement le début d’une politique publique de rénovation.
2013-2020 : l’APR bâtiments responsables ; passer d’une logique de moyens à une logique de résultats
En 2013, l’ADEME ouvre un APR dédié « Vers des bâtiments responsables à l’horizon 2020 ». Entre 2014 et 2018 émerge progressivement l’idée que, pour améliorer la performance d’une rénovation, il faut grouper et/ou phaser les travaux. Les incitations financières par bouquet de travaux apparaissent. Dans cette logique, l’ADEME soutient dès 2018 le projet B2C2, qui vise à mettre en place une méthodologie d’encadrement des rénovations BBC par étapes dans les territoires associés au projet (Bordeaux Métropole, Régions Normandie et Bourgogne-Franche-Comté). Le développement de connaissances et d’outils socio-économiques afin d’amplifier le passage à l’acte pour les travaux de rénovation devient alors incontournable. Entre 2014 et 2020, l’APR Bâtiments responsables contribue à éclairer ces enjeux en accompagnant les projets ATRE (élaboration d’un atlas territorial des gisements de rénovation sur la métropole de Marseille), CORE (identifications des conditions optimales, technico-financières et socio-anthropologiques, facilitant l’engagement des copropriétaires dans une rénovation énergétique), I3E Rénovation (définition d’une méthodologie d’évaluation d’indicateurs énergétiques, économiques et environnementaux pour l’aide à la décision entre différentes solutions de rénovation) ou PROFIL (identification des dynamiques socio-organisationnelles contribuant à la formation des prix sur le marché de la rénovation énergétique). Le financement des rénovations énergétiques n’est pas oublié, exploré à travers le projet TiersFi (Impacts énergie-climat et risques financiers des sociétés de tiers-financement). En 2018, la SNBC fixe l’objectif pour 2050 d’un parc de bâtiments au niveau BBC en moyenne, ouvrant le champ à une logique de résultats. L’ADEME renforce alors son soutien à des projets R-D pour explorer la pré-industrialisation hors site pour la construction et la rénovation.
2021 : point d’orgue de cette évolution, la rénovation performante
Au-delà du développement de produits, de connaissances et d’outils visant à massifier la rénovation, la performance s’impose en problématique transversale. En effet, les enquêtes faites en 2016-2017 montrent que 75 % des travaux de rénovation en maisons individuelles n’ont pas permis de changer de classe de DPE. En 2021, l’étude Rénovation performante par étapes de l’ADEME analyse les conditions nécessaires pour atteindre à terme la performance BBC ou équivalent en logement individuel. Six postes de travaux apparaissent incontournables : isolation des murs, de la toiture, du plancher bas, et remplacement des menuiseries, du système de ventilation et du système de chauffage/ECS. L’étude montre que la réalisation de travaux non coordonnés de rénovation peut conduire à des impasses techniques et que l’ordonnancement des travaux est crucial pour une rénovation performante. Complétant cette étude, le projet « Travaux par étapes : les points de vigilance » analyse en 2022 les interfaces à risque lors de travaux de rénovations menés de manière indépendante. Les résultats de ces différents projets ont contribué à la définition de la rénovation performante, introduite par la loi dite « Climat et résilience ».
1. Rénovation à basse consommation d’énergie des logements en France, Olivier SIDLER, E N E R T E C H, août 2007