L’articulation entre recherche, outils opérationnels et acteurs du terrain est plus que jamais essentielle pour répondre aux défis de la transition écologique. Parmi les leviers clés, il y a la coconstruction des solutions avec les parties prenantes, la diffusion active des connaissances à travers des outils adaptés et des formations, ainsi que l’expérimentation sur le terrain pour valider et ajuster les innovations. Interview de Jérémie Almosni, directeur Villes et Territoires durables à l’ADEME.
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Pouvez-vous nous expliquer comment s’organise la recherche à l’ADEME ?
À l’ADEME, les experts sont en charge à la fois de développement d’outils opérationnels et de recherche. Ce circuit court permet d’alimenter les questions de recherche et d’être toujours à l’écoute des besoins des utilisateurs. Dans le secteur du bâtiment, la recherche s’organise autour de l’APR « Vers des bâtiments responsables », qui ouvre cette année sa 8e édition. Tous les deux ans, en fonction du contexte et des besoins identifiés, nous nous réunissons en interne pour définir les questions prioritaires et proposer une rédaction du cahier des charges de l’APR en fonction. Nous associons à cette réflexion nos partenaires institutionnels pour prendre en compte leurs besoins.
Comment la recherche façonne-t-elle les politiques publiques ?
La recherche alimente les dispositifs publics de différentes manières. Nous associons les partenaires institutionnels pour le suivi des travaux de recherche et l’utilisation des résultats. Pilotés avec la DHUP (Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages), ces travaux ont par exemple permis d’alimenter la réflexion sur la réglementation environnementale.
Le projet PROMEVENT, coordonné par le CEREMA, a permis d’élaborer un protocole de vérification des systèmes de ventilation, retenu ensuite dans la réglementation environnementale RE2020.
Autre exemple, le projet CIBLE, coordonné par le CSTB (Centre scientifique et technique du bâtiment), a permis de définir les prescriptions pour un outil de référence d’écoconception du bâtiment, afin d’accompagner l’ensemble des acteurs du bâtiment, utilisable durant les 15 ans qui suivront sa mise en service. Ce document est issu d’un travail collaboratif qui reflète les besoins et idées de tous les participants, avec des prescriptions techniques pour y répondre.
Comment l’ADEME facilite-t-elle le passage de la recherche au marché ?
L’un des leviers majeurs réside dans la coconstruction avec les acteurs de terrain. Impliquer très tôt les professionnels, les collectivités et les usagers dans les projets de recherche permet d’assurer que les solutions développées répondent à des besoins réels et qu’elles sont facilement appropriables.
Les résultats des projets de recherche ciblent une diversité d’acteurs du bâtiment, en particulier les fédérations professionnelles, les maîtres d’ouvrage, maîtres d’oeuvre et tous les professionnels.
Le projet RESILIANCE issu de l’édition 2020 a permis de tester différentes solutions d’adaptation sur plusieurs types de bâtiments en fonction des risques de canicule. Ce rapport a fait l’objet d’un guide très utilisé par les concepteurs de bâtiments.
Nous travaillons par exemple avec Leroy Merlin Source avec qui nous avons mené des travaux de recherche sur le pavillonnaire urbain. Les résultats ont ainsi nourri les débats sur la densification urbaine, la rénovation énergétique et la qualité de vie, en proposant des pistes concrètes pour des politiques publiques plus volontaristes à l’égard de ces quartiers souvent négligés. Il a aussi permis d’ouvrir le dialogue entre chercheurs, professionnels, collectivités et habitants, condition essentielle pour imaginer la ville durable de demain.
Nous nous efforçons d’être l’agence des solutions, en accompagnant les innovations jusqu’à leur déploiement à grande échelle. Nous soutenons également l’expérimentation sur le terrain, via des démonstrateurs, et valorisons les résultats à travers des plateformes collaboratives, des formations et différents réseaux d’acteurs. L’objectif est de créer un effet d’entraînement en montrant que ces solutions sont efficaces, reproductibles et économiquement viables