Dossier

Empreinte carbone : quelles actions à l’échelle individuelle ?

En France, chaque habitant émet environ 9 tonnes de CO2 par an. D’ici à 2050, pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, notre bilan carbone individuel devra avoir été ramené à 2 tonnes… Mais comment passer de l’injonction collective à l’action individuelle ? Avec la méthode MicMac et le simulateur « Nos Gestes Climat », l’association Avenir Climatique et l’ADEME apportent des pistes de réponse. Le point avec Laurène Branaa, responsable de « Nos Gestes Climat » à l’ADEME et Mathieu Farges, coordinateur bénévole projet Carbone Campus, Avenir Climatique.


Quelle conscience ont les Français de leur empreinte carbone ?
Laurène Branaa

Il y a beaucoup de « bruit médiatique » autour de l’empreinte carbone, mais cela n’aide pas les gens à y voir plus clair. Au contraire, cela a tendance à fausser la perception des ordres de grandeur en attirant l’attention sur des sujets parfois anecdotiques. Les gens ont l’impression qu’il est suffisant de trier leurs mails et leurs déchets mais passent totalement à côté du coût carbone de leurs trajets en avion ou de la viande qu’ils mangent.

Mathieu Farges

Dans les ateliers que nous organisons pour sensibiliser le grand public à la comptabilité carbone, nous constatons aussi que certains préjugés ont la vie dure. Les personnes les plus aisées ont tendance à penser que leur bilan carbone est meilleur que celui des ménages modestes qui ont une alimentation moins bio et des voitures au diesel… Or l’expérience nous montre que le bilan carbone est globalement proportionnel au revenu : plus on est riche, plus on consomme, plus on émet.

Pourquoi avoir opté pour un simulateur de bilan carbone pour inciter les individus à agir sur leurs émissions ?
M. F. 

Lors de nos événements, nous nous rendons compte qu’il est très frustrant pour les gens de réaliser l’ampleur du problème sans savoir ce qu’ils peuvent faire à leur échelle pour améliorer la situation. C’est culpabilisant sans être responsabilisant ! Il nous semblait important d’associer étroitement la prise de conscience et les pistes d’action, à l’instar de ce qui se fait avec le bilan carbone des entreprises. C’est ce que nous avons fait avec le dispositif Mon Impact carbone, Mes Actions concrètes – MicMac pour les intimes –, qui préfigure l’outil en ligne « Nos Gestes Climat » de l’ADEME.

L.B.

Lancé en 2020, en partenariat avec l’Association Bilan Carbone, « Nos Gestes Climat » est à la fois une plateforme de sensibilisation et un outil d’aide à la décision. Il permet de cerner les secteurs les plus émissifs de notre vie quotidienne et ainsi de choisir les leviers à actionner en priorité. Nous sommes en train de repenser cette partie « leviers » pour qu’elle soit encore plus incitative.

Au-delà de la prise de conscience, quelles sont les conditions nécessaires à réunir pour faire évoluer les imaginaires et les comportements ?
M.F.

Il faut d’abord casser le triangle de l’inaction, une expression qui désigne la situation de blocage collectif où politiques, entreprises et individus se dédouanent de leurs responsabilités en renvoyant la faute sur les autres catégories. Et les citoyens ont ici un rôle clé à jouer en faisant pression sur les acteurs privés et les collectivités pour qu’ils prennent leur part dans la décarbonation de notre société.

L.B.

Je partage entièrement ce point de vue, d’ailleurs l’une des propositions d’action de « Nos Gestes Climat » porte précisément sur ce point. Je crois de plus que nous avons tous besoin d’exemples inspirants, qu’on nous propose de faire des choses qui rendent la transition enthousiasmante et qui fassent envie. Cela passe par des choses très simples comme la valorisation des aspects positifs des mesures bas carbone : la dimension santé du vélo, des recettes vegan savoureuses, des lieux de vacances qui font rêver sans prendre l’avion…