Nos déchets alimentaires et de jardinage sont souvent jetés avec les ordures, puis incinérés ou enfouis. Bref, gaspillés. Or, c’est une ressource indispensable pour nourrir les sols et produire du biométhane. C’est pourquoi depuis le 1er janvier 2024, toutes les collectivités doivent proposer une solution de tri à leurs habitants. On vous dit tout sur ce que cela signifie et sur les bénéfices de cette nouvelle organisation.
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Un impératif : alléger les poubelles grises
Pour bien comprendre cette nouvelle obligation, il faut revenir à ses origines. Les biodéchets regroupent les déchets alimentaires (restes de repas, produits périmés ou non consommés…) et ce qu’on appelle les « déchets verts », c’est-à-dire issus des parcs et jardins (feuilles mortes, haies, brindilles, herbe coupée, déchets ligneux…). Ils représentent un tiers de nos ordures ménagères, soit 83 kg/an/habitant et finissent incinérés ou enterrés, ce qui émet des gaz à effet de serre. Or, avec l’augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), les collectivités doivent impérativement réduire les ordures envoyées en décharge ou brûlées. Alléger la poubelle grise implique donc de sortir les biodéchets des ordures ménagères. Et c’est loin d’être anecdotique.
Une matière organique précieuse
C’est un petit or vert qui va être recueilli. « Il y a actuellement une dégradation de la qualité des sols et donc une augmentation des apports réguliers en engrais et en matières organiques souvent acheminés sur de longues distances » explique Muriel Bruschet, Ingénieure Biodéchets ADEME. « Pourtant, les biodéchets locaux peuvent s’y substituer et servir d’engrais ou de matière organique pour protéger les sols et conserver l’eau, notamment en cas de sécheresse ». N’en jetez plus, cette solution s’impose d’elle-même. Et ce n’est pas tout. « On fait aussi de la méthanisation avec les biodéchets, afin de produire du biogaz qui est réinjecté dans les réseaux en substitution au gaz naturel » souligne Muriel Bruschet. Amendements organiques et biométhane forment ainsi les deux débouchés majeurs pour les biodéchets.
À chaque situation, une solution
Depuis le 1er janvier 2024, le tri des biodéchets est généralisé et concerne tous les professionnels et les particuliers. Pour être en règle, les collectivités doivent proposer des solutions accessibles et avoir communiqué sur cette obligation auprès de leurs administrés. « Parmi les solutions, il y a la collecte séparée, à l’image du bac jaune mais aussi les points d’apports volontaires, qui permettent de redistribuer en grande quantité la matière organique dans le monde agricole autour » détaille Muriel Bruschet. « Il existe aussi l’alternative des composteurs de quartiers, situés au pied des immeubles et dont le compost est réutilisé sur place par les habitants au bout de 9 mois ».
Les élus, clés de la réussite
La machine se met doucement en route : 20 millions d’habitants sont desservis par une solution en ce début d’année. Mais on est encore loin des 100% attendus ! Ce qui freine les collectivités ? « Le surcoût est évidemment perçu comme un frein, malgré les importants bénéfices environnementaux et agricoles à la clé » indique Muriel Bruschet. Il est actuellement estimé à 15/25 € par habitant pour la collecte séparée par exemple. « Pour que le dispositif fonctionne, il faut réussir à collecter suffisamment, mobiliser les habitants, bref, adopter une démarche globale et pas simplement proposer une solution de collecte » précise Muriel Bruschet. Un engagement est attendu de la part des élus pour faire comprendre le système à leurs administrés et en présenter les bénéfices. Il faut également lutter contre les fake news qui circulent par exemple sur les réseaux sociaux, certaines évoquent « une amende en cas de non compostage ». C’est bien évidemment faux.
L’ADEME accompagne les collectivités de la phase étude à la concertation territoriale en passant par la sensibilisation des élus. Nous mettons tout en œuvre pour convaincre les territoires de l’intérêt du tri à la source des biodéchets
La dynamique est lancée, il faut maintenant en parler !
Le Plan de relance 2021/2022 a permis à plus de 500 porteurs de projets de développer la collecte et le tri des biodéchets, avec un budget de 100 millions d’euros pour les deux ans. En 2023, presque 200 dossiers se sont partagés l’enveloppe de 60 millions d’euros du Fonds vert, un dispositif exceptionnellement prolongé en 2024. « Parmi les collectivités qui s’engagent, il y a autant de zones rurales qu’urbaines » indique Muriel Bruschet. Colmar Agglomération fait figure de précurseur, ayant initié la collecte séparée des biodéchets il y a déjà 10 ans. Le SMICTOM du Pays de Vilaine a aussi déployé la collecte séparée sur tout son territoire. De son côté, Le Grand Besançon a choisi de développer uniquement la gestion de proximité avec les composteurs de quartier. Quant au Grand Lyon, des points d’apport volontaire ont été installés en un an sur l’intégralité du territoire. Pour toutes ces collectivités, la mise en place de solutions a été efficace. Reste désormais à communiquer massivement pour augmenter les quantités collectées. « Le prospectus dans la boîte aux lettres ne suffit pas, il faut diversifier les canaux et en parler partout, sur Internet, dans la presse… » recommande Muriel Bruschet. La communication sera donc décisive, partout en France cette année.