Dossier

De la nature dans les cours d’école

À Échirolles, une cour d’école bitumée s’est transformée en îlot de fraîcheur urbain. Une opération exemplaire aux bénéfices multiples, pour la santé comme pour l’environnement.
Le point avec Ariane Rozo, coordinatrice Urbanisme en lien avec la santé et l’environnement à l’ADEME et Christophe Romero, directeur adjoint de la Ville durable, à Échirolles (Isère).


En quoi a consisté l’opération menée à Échirolles ?
Christophe Romero 

Cette action s’inscrit dans la lutte contre les îlots de chaleur urbains (ICU). En caractérisant ces îlots avec un géographe-climatologue, nous avons réalisé une cartographie mettant en évidence les secteurs les plus exposés. Parmi eux, le site de l’école Marcel-David, bitumé à 94 % sur plus de 8 000 m2 réunissait toutes les conditions pour être transformé en îlot de fraîcheur urbain de proximité. Les solutions testées sur ce démonstrateur ont vocation à être répliquées. Il s’agit essentiellement de solutions d’adaptation fondées sur la nature : désimperméabilisation du site, récupération et infiltration des eaux pluviales, végétalisation et plantation d’arbres, création d’une mare pédagogique…

Ariane Rozo

En mars 2022, cette opération a été récompensée par un « trophée ARTISAN », illustrant ainsi son caractère exemplaire en matière de « solutions d’adaptation fondées sur la nature ». ARTISAN est un projet européen piloté par l’Office français de la biodiversité et dont l’ADEME est partenaire.

Comment le projet a-t-il été accueilli ?
C.R. 

Avec un peu d’incrédulité au départ. Le quartier dans lequel se trouve l’école n’avait pas fait l’objet de travaux conséquents sur les espaces publics depuis plusieurs années. Notre volonté d’aller plus loin qu’une simple remise en état et notre niveau d’ambition ont surpris les habitants, les parents d’élèves et même les enseignants. La présence d’une mare a suscité quelques inquiétudes : danger potentiel pour les enfants, prolifération de moustiques… Beaucoup ont aussi redouté que les travaux impactent la rentrée des classes. Il a fallu rassurer, montrer que le projet avait anticipé ces risques. Aujourd’hui, maintenant que nous avons tenu nos promesses, que les délais ont été respectés, le sentiment qui prédomine est la fierté. Tous sont fiers de leur école, de leur quartier.

A.R.

Un des facteurs de succès de l’opération tient à son portage. Son inscription dans la feuille de route du plan climat-air-énergie territorial 2020-2026 a permis d’impliquer l’ensemble des services communaux, et de communiquer tout au long du projet, avec les habitants qui profitent d’une partie des nouveaux aménagements en dehors des temps scolaires. Plus globalement, sur ce type de projets, l’implication du corps enseignant est essentielle.

Quels bénéfices sur la santé ont été observés en remettant ainsi de la nature en ville ?
C.R.

Lorsqu’il était bitumé, cet espace était plus chaud de 3,4 °C que les parties de la ville qui n’étaient pas soumises au phénomène d’îlot de chaleur urbain. Aujourd’hui, la cour de l’école et ses abords, largement végétalisés, sont devenus un refuge pendant les canicules. Au-delà, les bénéfices sont multiples. Les plantations, la mare, les nichoirs à oiseaux et chauves-souris offrent des milieux favorables à la  biodiversité. Les aménagements servent également de support à des activités pédagogiques. Enfin, la collecte et l’infiltration naturelle des eaux de pluie contribuent à la résilience de la ville lors des épisodes orageux.

A.R. 

Les solutions fondées sur la nature s’inscrivent dans une approche de santé globale. Ce que montre la transformation de la cour de l’école Marcel-David et de ses abords, c’est qu’à l’échelle la plus locale, comme à celle de la planète, santé publique, animale et environnementale sont intimement liées.