À Roubaix, Fashion Green Hub met en réseau des acteurs du textile au service d’une mode durable, éthique, innovante et créatrice d’emploi. Entretien entre François Humbert, ingénieur Économie circulaire à l’ADEME Hauts-de-France et Annick Jehanne, présidente de Fashion Green Hub.
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Nous voulions changer radicalement le business model de la mode, qui allait à sa perte ! Nous étions aussi motivés par une envie de remettre le textile au coeur des territoires des Hauts-de-France. Pour ce faire, nous avons souhaité dépasser les clivages traditionnels inhérents à notre secteur pour embarquer le plus d’acteurs possible : fabricants, marques, distributeurs, collectivités, associations, écoles de mode, organismes de recherche autour de réflexions puis d’actions communes…
Cette posture fédératrice correspond bien à la vision de l’ADEME et c’est tout naturellement que nous avons souhaité soutenir cette initiative, avec la Région Hauts-de-France. Nous sommes persuadés que la mise en réseau des acteurs peut accélérer la mutation de la mode en facilitant l’émergence de solutions techniques, sociétales et environnementales partagées, qui peuvent en outre être exploitées dans les projets propres à chacune des structures impliquées.
L’un des grands volets d’activité de Fashion Green Hub est l’organisation des Fashion Tech Days et des Fashion Green days, qui sont des événements de sensibilisation, de partage de connaissances et de prospective. L’association en elle-même réunit désormais 300 entreprises, qui ont appris à collaborer pour avancer ensemble sur des sujets comme la place du plastique dans la logistique du vêtement, la chaîne de valeur du lin, l’affichage environnemental ou encore le recyclage des invendus neufs. Nous avons par ailleurs ouvert un atelier de conception « agile » pour démontrer la faisabilité d’une mode « à la demande » durable et locale ; fin 2021, il sera doté d’un parc de machines innovant qui permettra de passer de l’idée au produit en sept jours.
La démarche de Fashion Green Hub a d’ores et déjà été couronnée de beaux succès, mais ce que je retiens surtout c’est que les travaux menés en son sein essaiment rapidement au-dehors, et c’est un signe positif ! Par ailleurs, l’association joue pleinement son rôle de plateforme de rencontres et de synergies. Des projets collaboratifs ont ainsi vu le jour en associant plusieurs membres, à l’instar de Modimalisme – soutenu par l’ADEME et la Région – pour la valorisation des invendus textiles de grandes enseignes de mode dans une démarche collaborative et locale.
Je pense qu’un des principaux freins tient à l’ancrage des modèles économiques actuels, qui peuvent empêcher les décideurs d’imaginer un avenir en dehors des sentiers battus, mais où ils pourraient trouver aussi de la rentabilité. Dans cette optique, l’ADEME s’efforce de faciliter le passage à l’action des entreprises en mobilisant ses dispositifs d’accompagnement et via la mise en relation avec ses partenaires sur tout le territoire national. À cette échelle aussi, la collaboration, c’est l’avenir !
De mon point de vue, je constate qu’il y a encore des freins psychologiques, notamment chez les dirigeants, qui doivent accepter de repenser leurs organisations et les critères de performance. Pour les faire bouger, il faudra sans doute des contraintes supplémentaires, mais ils ont aussi besoin de voir qu’une autre mode est possible, que d’autres l’ont fait et y ont gagné de l’argent et que ce n’est pas une usine à gaz. C’est le credo qui continuera à animer les acteurs de Fashion Green Hub dans les années qui viennent.