Dossier

Les acteurs du tourisme prêts à revoir leur modèle

En freinant brutalement l’activité touristique, la crise sanitaire a donné aux professionnels l’occasion de réfléchir à d’autres modèles de développement. Une démarche soutenue par le Fonds Tourisme Durable porté par l’ADEME.


Pour la première fois, les planètes sont peut-être en train de s’aligner. En mars 2021, à l’oc­casion des Rencontres du Tourisme Durable organisées en partenariat avec le Cercle de Giverny, l’IFOP faisait le point sur l’évolution des attentes des Français. 44 % d’entre eux se déclarent prêts à payer plus cher leur séjour pour voyager de manière responsable et respec­tueuse de l’environnement. 88 % sont même favorables à des quotas et à une restriction des visites pour les sites emblématiques. Les consommateurs français seraient donc de plus en plus soucieux de réduire l’impact envi­ronnemental de leurs vacances… Saisissant le vent favo­rable, l’ADEME s’est associée en mai au magazine Conso Mag de France Télévision pour des sujets consacrés au tourisme durable.
Ces évolutions de comportement ont donné de nouvelles perspectives à des professions terrassées par le long tunnel de la crise sanitaire et des fermetures successives. Et si la pandémie était l’occasion – puisqu’ils en avaient enfin le temps – de se pencher sérieusement sur ces questions ? Si certains entament leur réflexion, d’autres ont déjà franchi le pas, à l’instar de vingt restaurateurs bretons, qui expérimentent un nouveau référentiel tourisme durable mis en place par l’ADEME Bretagne. Autant d’initiatives qu’il faut encourager et démultiplier pour réduire durablement l’impact écologique du tourisme. Responsable de 11 % des émissions de gaz à effet de serre en France, le secteur exerce aussi de multiples pressions sur les territoires les plus fréquentés : artificialisation des sols pour la construction d’hébergements, pression sur les ressources naturelles… La dé-densification du tourisme et l’ouverture à de nouvelles destinations rurales sont donc des objectifs majeurs du tourisme durable. Ce rééquilibrage est d’autant plus souhaitable qu’il va aussi dans le sens d’une meilleure accessibilité financière et physique des destinations de vacances, d’un tourisme durable pour tous.

11 %

des émissions de GES de la France proviennent de l’activité touristique

L’ADEME, opérateur du fonds tourisme durable

Pour aider les acteurs du tourisme dans leur transition écologique et leur résilience économique, le gouvernement a lancé en septembre 2020, dans le cadre de France Relance, un Fonds Tourisme Durable, assorti d’une enveloppe de 50 M€ pour la période 2021-2022. Inscrit dans le volet Cohésion sociale et territoriale, ce Fonds vise les territoires ruraux. Il cible les communes rurales, les communes de moins de 20 000 habitants dans les aires d’attraction de moins de 200 000 habitants et les petites villes de demain. Trois enveloppes sont prévues : 38 M€ pour les hébergeurs, 10 M€ pour les restaurateurs, dans le cadre de l’opération 1000 restaurants durables et 2 M€ pour les acteurs du slow tourisme.
Son déploiement est confié à l’ADEME qui accompagne déjà localement les acteurs du tourisme sur ces questions et qui a amplifié son intervention auprès du secteur suite à une mission confiée en 2019 par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. « Nous avons formulé un ensemble de préconisations visant à structurer une politique du tourisme durable en France. Certaines actions sont aujourd’hui couvertes par le Fonds Tourisme Durable et les autres constituent le socle de réflexion du Comité Filière Tourisme pour construire une stratégie sectorielle en cours de finalisation », précise Aude Andrup, coordinatrice nationale Tourisme Durable à l’ADEME. Une des actions phares de cette mission Tourisme Durable est la réalisation d’un bilan des émissions de gaz à effet de serre du secteur en France, dont les résultats ont été publiés début juin. « La démarche est novatrice, car jusque-là, même au niveau mondial, nous n’avions pas de mesures précises de cet impact. L’objectif est de mesurer finement l’impact du secteur pour avoir « une boussole » et produire des recommandations » résume Robert Bellini, responsable pôle Adaptation à l’ADEME.

7 %

c’est la part du tourisme dans le PIB français

Soutenir les actions locales

En tant qu’opérateur du Fonds Tourisme Durable, l’ADEME a lancé en décembre 2020 un appel à manifestation d’intérêt pour trouver des partenaires locaux prêts à accompagner les acteurs du tourisme dans ce dispositif. 68 partenaires sont retenus, aux profils très divers : des CCI, des parcs naturels régionaux, des organismes institutionnels du tourisme… « Tout un écosystème se structure autour du tourisme durable. L’objectif n’est pas de créer une niche « tourisme durable », mais de faire en sorte que tous les professionnels aillent dans ce sens pour une approche intégrée à leur activité », pointe Sophie Portier, responsable du Fonds Tourisme Durable. Les TPE-PME éligibles bénéficient d’un diagnostic gratuit et de la mise au point d’un plan d’action, accompagnées par les partenaires de l’ADEME. Elles déposent alors une demande de subvention sur la plateforme Agir de l’ADEME, qui se charge d’étudier le dossier et d’octroyer l’aide. Si l’intérêt des professionnels est palpable, reste à assurer la montée en puissance. « L’idée est qu’un maximum d’entreprises mettent le pied à l’étrier, même avec des actions modestes au départ. Nous semons des graines, qui finiront par germer », conclut Sophie Portier.

Lourdes, une journée pour « penser l’après »

Pour les acteurs du secteur, la crise sanitaire est  une épreuve qui amène à repenser le tourisme, collectivement. C’est la démarche initiée par l’ADEME Occitanie pour la ville de Lourdes, deuxième ville hôtelière de France, particulièrement touchée par la pandémie, qui a réuni le 9 avril tous les acteurs de la filière, pour une matinée de travail. Objectif : tracer ensemble le chemin d’une relance du secteur via le tourisme durable. Dans une dynamique territoriale similaire, une journée des ambassadeurs du tourisme durable avait eu lieu en Corse, le 16 Octobre 2020.

En savoir plus

 

1 000 restaurants durables dans les starting-blocks

L’opération « 1000 restaurants durables »  constitue un volet du Fonds Tourisme Durable. Pour en bénéficier, les restaurateurs signent un cadre dans lequel ils s’engagent à réaliser un diagnostic et à progresser dans les trois ans à venir sur tous les aspects de la transition écologique : circuits courts, saisonnalité, intégration du végétal, lutte contre le gaspillage alimentaire, mobilités douces, économies d’énergie, d’eau, communication auprès des clients, etc. Ils bénéficient d’une enveloppe maximale de 10 000 euros, pour financer des équipements de cuisine pour travailler des produits bruts, du matériel pour réduire le gaspillage alimentaire (déshydrateurs alimentaires ou vaisselle durable adaptable à l’appétit des convives), une formation à la cuisine végétale, l’installation d’un potager biologique, etc.

 En savoir plus : agirpourlatransition.ademe.fr/entreprises/dispositif-aide/fonds-tourisme-durable-restaurateurs-hebergeurs-accelerez-transition-ecologique