Dossier

Préserver la santé des sols forestiers

La qualité des sols est tout aussi importante que la végétation dans la capacité des forêts à stocker le carbone atmosphérique et à maintenir la biodiversité, ainsi que dans leur résilience. Le point avec Antoine Pierart, ingénieur Sols et prospective à l’ADEME et Françoise Alric, directrice adjointe de la Fédération nationale des communes forestières (FNCoFor).


À quels risques sont exposés les sols forestiers ?
Antoine Pierart 

Le changement climatique et les pratiques de gestion et d’exploitation inadaptées (coupes mettant les sols à nu sur de grandes surfaces, etc.) menacent la qualité des sols, avec des répercussions sur tout l’écosystème forestier. Les sols sont le socle de la croissance et de la vitalité de la végétation. Ils abritent une grande variété d’animaux et de micro-organismes qui, en se nourrissant de bois en décomposition, participent au stockage du carbone et à la fertilité de la terre.

Que faire pour préserver les sols ?
A.P. 

L’ADEME a été désignée par les ministères en charge de l’Écologie et de l’Agriculture pour coordonner la rédaction d’un plan d’action national dédié à la protection des sols forestiers. À cette fin, nous avons organisé des ateliers avec toutes les parties prenantes (représentants des gestionnaires et exploitants forestiers, monde académique, associations environnementales, etc.). Plusieurs freins ont été identifiés, notamment un manque d’information, de sensibilisation et de formation des professionnels de terrain, et la nécessité de développer de nouveaux outils (de diagnostic et suivi des sols, par exemple) et des incitations économiques (pour l’adoption de techniques et/ou engins plus adaptés, etc.). Enfin, l’amélioration des connaissances sur l’impact des pratiques sylvicoles a été soulignée. Ce plan devrait être finalisé pour l’été.

Pourquoi prendre soin des sols forestiers ?
Françoise Alric

Les sols abritent une grande biodiversité et stockent d’importantes quantités de carbone. Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas exploiter les forêts : leur gestion durable passe par des coupes de bois et des élagages respectant des bonnes pratiques. Dans les forêts publiques, c’est l’Office national des forêts (ONF) qui gère cela.

Que peuvent faire les communes propriétaires de forêts ?
F.A.

Elles travaillent avec l’ONF à la gestion durable de leurs forêts. Ce sont elles aussi qui valident les investissements nécessaires à l’exploitation du bois et aux travaux sylvicoles. Elles peuvent donc favoriser l’achat d’équipements moins impactants pour les sols, comme les y incite à le faire l’ADEME via ses nouveaux appels à projets. Les engins actuels permettent déjà de prélever plus de bois sans beaucoup se déplacer. L’enjeu, maintenant, est de réduire leur pression sur le sol.

Il y a aussi un enjeu de prévention des risques…
F.A. 

Tout à fait. Au-delà du rôle que jouent les forêts dans l’atténuation du changement climatique, la protection de la biodiversité et l’attractivité touristique d’un territoire, elles aident à prévenir les dégâts de certaines catastrophes naturelles. Les coupes d’arbres qui ne sont pas pratiquées dans le cadre d’une gestion durable augmentent le risque d’érosion et d’imperméabilité, donc de coulées de boue ou de glissements de terrain en cas de fortes précipitations.