La communication telle que nous la connaissons est-elle vouée à disparaître ? Les slogans incitant à la surconsommation, les pubs qui inondent les boîtes aux lettres, les écrans lumineux allumés 24h/24… L’ADEME et l’Association des Agences-Conseils en Communication (AACC) ont mis en ligne un cours en accès libre pour former les communicants en devenir ou déjà en exercice aux enjeux sociétaux et environnementaux liés à la communication. Entretien avec Valérie Richard, responsable RSE au sein de l’agence BETC et pilote du projet.
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Si une agence de communication émet en grande majorité des idées, elle doit néanmoins s’interroger sur l’impact des produits et des marques dont elle fait la promotion, ainsi que sur les messages véhiculés, la manière de les concevoir et les méthodes de diffusion. Il faut analyser l’intégralité de la chaîne de valeur, jusqu’aux fournisseurs.
Le secteur de la communication comporte une grande part de créativité. Or, nos créatifs en agence ne veulent pas avoir l’impression « qu’on les bride », avec des injonctions sur « ce qu’on peut dire ou non ». Il faut leur expliquer que la transition écologique est une opportunité pour eux. Face à un réchauffement climatique qui suscite de l’anxiété, ils doivent donner envie de prendre part à la transition écologique. Il faut rendre le monde de demain désirable !
Nous devons commencer par montrer la société dans son intégralité et sa diversité, en évitant soigneusement les stéréotypes. Il faut également réussir à mettre en scène subtilement le monde tel qu’on voudrait qu’il soit, le monde de demain. Une simple publicité pour du café peut être l’occasion de montrer des personnes qui portent un pull en intérieur parce que c’est l’hiver ou une cuisine avec des produits en vrac.
Oui, en partie. L’AACC propose un calculateur carbone gratuit pour toutes les agences de communication pour mesurer les émissions directes (scope 1) et indirectes (scopes 2 et 3). Depuis le 1er janvier 2024, la directive européenne Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) fixe de nouvelles règles aux entreprises pour leur reporting extra-financier. Ce bilan carbone devient donc la règle pour toutes les entreprises, à l’exception des micro-entreprises.
C’est un cours autoporté, sous forme de powerpoint, qui donne toutes les guidelines avec des exemples récents. Il s’articule en quatre grands blocs pédagogiques, avec des cas pratiques pour s’exercer. La première partie dresse un état des lieux, avec les grands enjeux climatiques et sociétaux actuels. Elle développe aussi les nouvelles formes d’économie, comme l’économie collaborative ou l’économie de la fonctionnalité et s’attache à expliquer les attentes actuelles des citoyens consommateurs et les évolutions nécessaires à suivre.
La deuxième partie interroge notre capacité à faire de la communication responsable. Après des années de messages qui vantaient la surconsommation, renforçaient les stéréotypes, entretenaient la confusion entre information et influence et saturaient l’espace public et privé, comment faire évoluer nos pratiques ? Nous proposons donc des pistes pour que la communication se mette au service d’une transformation positive. Les agences ont trois grandes responsabilités : accompagner les marques vers des sujets plus responsables, encourager les consommateurs à adopter des comportements plus vertueux et contribuer à l’écriture des nouveaux récits qui rendent la transition écologique et sociale attractive. Dans cette partie, nous proposons une définition détaillée des éléments clés d’une communication responsable, avec de nombreux exemples, ainsi que les écueils à éviter, comme le goodwashing (pratique qui consiste à se servir des thématiques de la transition écologique ou de la stratégie RSE d’une entreprise pour vendre un produit).
La troisième partie du cours se penche sur l’éco-socio-conception et la diffusion des campagnes. Nous devons mesurer et réduire l’impact de nos tournages, films et autres plans médias qui sont des postes fortement émetteurs dans notre secteur. Très concrètement, il s’agit de limiter la consommation de ressources naturelles, la production de déchets ou encore les émissions de gaz à effet de serre sur tout le cycle de vie d’une campagne. Le tournage à l’étranger d’une publicité de 20 secondes émet autant de tonnes équivalent CO2 que 74 vols Paris/NYC ! Cette partie donne les leviers et bonnes pratiques pour écoconcevoir ses projets de communication, avec tous les outils à disposition, allant de l’autodiagnostic ADERE au label LEAD en passant par la norme ISO 20121. Elle explique aussi comment établir un plan média responsable, comment faire de l’influence responsable…
Enfin, la quatrième partie du cours s’intéresse à la gouvernance et responsabilité, avec un focus sur les obligations de la Loi Climat et Résilience adoptée en 2021. Cette loi acte le fait que les communications commerciales jouent un rôle quotidien en influant sur le comportement des consommateurs. Elle interdit d’affirmer dans une publicité qu’un produit ou un service est « neutre en carbone » ou toute formule équivalente. Ainsi, il n’est désormais plus possible de dire qu’un produit ou service a un « effet positif » ou « n’a pas d’incidence sur l’environnement » ou encore qu’il est « moins néfaste pour l’environnement ». Toutes ces formules qui s’apparentent à du greenwashing sont aujourd’hui punissables par la loi, avec une amende.
Sa force réside dans sa capacité à montrer une transition sociétale et environnementale réussie, à montrer qu’on sera heureux même en consommant moins de ressources et contrairement à ce qui est promu depuis des dizaines d’années. ne enseigne de grande distribution a par exemple fait une campagne mettant en scène des clients qui voulaient consommer responsable mais se heurtaient à certains obstacles, pour en rire et dédramatiser le sujet. C’est dans cette direction qu’il faut aller !