Portrait

« Ce ne sera bientôt plus le temps des mesures douces »

Entrepreneur à succès, Mehdi Coly se met au service de l’urgence climatique en créant un fonds d’investissement vert – Time for the Planet – et vise le milliard d’euros collectés pour financer 100 entreprises qui luttent contre les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030.


Mehdi Coly a le goût de l’entrepreneuriat. À 36 ans, le Lyonnais a déjà une demi-douzaine d’entreprises sur son CV. Sa première idée lui vient alors qu’il finance ses études de droit en animant des colonies. « J’ai vite constaté que les enfants en situation de handicap n’avaient pas accès aux séjours, faute d’un encadrement adapté », se souvient-il. À 20 ans à peine, il lance donc Vitacolo, qui propose des vacances inclusives avec des animateurs référents formés. Le pari est réussi et Mehdi Coly découvre la puissance de l’entrepreneuriat à impact social. « Mais j’avais besoin d’acquérir plus d’expérience, de mieux maîtriser les ficelles pour lever des fonds, etc. »

Pendant dix ans, il fonde plusieurs start-up, dans la tech, le référencement ­Internet. Jusqu’au jour où l’urgence climatique le rattrape. « En 2018, j’étais aux États-Unis pour développer mon activité lorsque j’ai découvert par hasard les discours de l’ingénieur Jean-Marc ­Jancovici et de l’écrivain Pablo Servigne. La prise de conscience est immédiate. J’ai changé les serveurs de mes structures, arrêté de prendre l’avion et stoppé le référencement Internet », raconte aujourd’hui ce papa de deux jeunes enfants.

Agir à grande échelle

En 2020, Mehdi Coly et six fondateurs pressés de changer le monde créent Time for the Planet. Le principe ? Offrir la possibilité aux citoyens d’agir à grande échelle contre le changement climatique. « Il existe des innovations pour combattre le réchauffement climatique et elles n’arrivent pas à grandir. Grâce au plus grand financement participatif de France, Time for the Planet a déjà collecté 10 millions d’euros et financé trois solutions innovantes capables de réduire les émissions de carbone ou de les capter », détaille avec enthousiasme Medhi Coly.

Parmi les lauréats, on trouve Leviathan Dynamics, qui, grâce à une enveloppe de 350 000 euros, veut proposer un système de climatisation fonctionnant avec de l’eau. La force de Time for the Planet est d’intégrer des entrepreneurs aguerris aux projets, afin d’assurer la pérennité du process. En prime, tous les procédés techniques sont rendus publics, en open source, pour que leur application par d’autres en démultiplie l’effet.

Dividendes Climat

Deux ans après son lancement, plus de 50 000 citoyens, entreprises et fonds d’investissement participent à l’aventure Time for the Planet. Mehdi Coly sent que le concept est le bon. « Chaque euro investi donne droit à une action. Mais il ne faut pas attendre de retour financier, en tout cas pas avant que les objectifs de réduction carbone ne soient atteints. » À la place, il a imaginé en partenariat avec l’ADEME les « dividendes Climat ». « C’est notre indicateur de performance chez Time for the Planet et c’est comme ça que nous rémunérons nos actionnaires, qui reçoivent un suivi précis de la quantité de gaz à effet de serre non émis ou stocké grâce à l’investissement. » Cet ancien champion de France d’équitation sait qu’il reste des obstacles à franchir. « Mais si nous ne réagissons pas, ce ne sera bientôt plus le temps des mesures douces », prédit-il.