Dossier

Écoconception numérique : un sujet qui monte

Contrairement à ce que l’on peut penser, le numérique n’a rien d’immatériel. Ses impacts environnementaux sont bien réels. Des pionniers, comme Treebal, cherchent donc à les réduire. Le point avec Julia Meyer, ingénieure numérique responsable à l’ADEME et Samuel Le Port, cofondateur et directeur général de la messagerie instantanée Treebal.


Quel est l’impact des services numériques ?
Julia Meyer 

Les équipements, les réseaux et les data centers représentent 2,5 % de l’empreinte carbone et 10,3 % de la consommation d’électricité en France, selon une étude de l’ADEME et l’Arcep. Un poids considérable, qui a poussé l’État à légiférer. La loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) a notamment demandé en 2020 à l’ADEME d’élaborer un référentiel général d’affichage environnemental pour les services numériques et un autre pour la fourniture d’accès Internet. La loi de réduction de l’empreinte environnementale du numérique (REEN) prévoit de fixer des critères de conception durable pour les sites web à partir de 2024.

En quoi consiste le programme sur la sobriété numérique que l’ADEME lancera fin 2022 ?
J. M.

Ce programme s’est fixé comme objectifs de permettre, d’une part, à tous les usagers de services numériques d’aborder le sujet de la sobriété numérique, au travers notamment d’actions de formation et de sensibilisation, et d’autre part, de la mettre en œuvre en leur donnant des outils leur permettant de limiter l’impact environnemental de leurs usages.Il vise notamment à soutenir des actions collectives de formation, construire un cadre méthodologique (les données, référentiels et outils) destiné à mesurer et piloter la sobriété numérique, ou encore soutenir l’intégration de la sobriété numérique dans les stratégies des collectivités et des organisations.

Pourquoi avoir lancé l’écoconception d’une messagerie instantanée ?
Samuel Le Port 

Après vingt ans dans le digital, j’ai pris conscience qu’il n’y avait pas assez de ressources pour soutenir l’expansion continue de l’infrastructure numérique mondiale. Avec deux associés, nous avons donc décidé de créer une messagerie, de type Whats-App, plus responsable. L’aide de l’ADEME nous a permis de nous former à la sobriété numérique, mais aussi de faire appel à un UX-designer spécialisé, de l’agence Vertue. La version grand public de l’appli est sortie en 2021. La version professionnelle, lancée début 2022, permet aux entreprises d’organiser la communication avec leurs parties prenantes.

En quoi votre outil est-il plus sobre ?
S. Le P.

Nous n’avons gardé que l’indispensable. Ainsi, pour les appels, la vidéo n’est pas activée par défaut et, quand on la met, sa résolution est basse. Par défaut toujours, les messages sont supprimés après sept jours dans la version gratuite (un an dans la version pro) et le mode sombre est privilégié. Grâce à un codage sobre, donc moins lourd, nous luttons contre l’obsolescence des batteries et smartphones. Pour limiter les flux de datas, la plupart des données restent sur le téléphone et ne font pas d’allers-retours avec nos serveurs.

Qui sont vos clients ?
S. Le P.

Surtout des entreprises agroalimentaires locales, bretonnes, qui sont elles-mêmes engagées dans une démarche de responsabilité sociétale et environnementale (RSE).